E. Vandercammen - Etre
Ser, nada más (Jorge Guillén)
I
Déjà mes doigts n'éprouvent plus
Les formes tendres du présent,
Ce qui m'échappe, ô ma saison,
C'est la limite musicale
Entre mon corps et la substance
Où tu protèges tes racines.
Si ton argile a ses blessures
Comme une écorce condamnée,
Que ma chaleur calme ces plaies
En épousant leur profondeur.
II
Etre et rien de plus que le sang
Qui vient nourrir avec l'aurore
L'espoir et sa maturité;
Etre et prolonger l'habitude
Au-delà des jaunes automnes
Abandonnés sur les collines
Vais-je toucher longtemps l'aubier
Trop pâle où vient pleurer le vent?
J'y vois fleurir le marbre blanc
Taillé dans un morceau de nuit,
Mais je résiste au poids glacé
De cette chair contre ma chair :
L'attente est ma seule aventure.